Lorsque le soleil brillant se mit à parer son trône, une ronde sortit du camp du roi ; elle ne vit personne dans l’enceinte des tentes de Bahram, les tentes étaient debout, mais personne ne parut.
La ronde revint et rapporta ce qui s’était passé au roi, dont le cœur fut affligé, parce que son belliqueux’ ennemi lui échappait.
Il choisit trois mille hommes de guerre, des cavaliers couverts de cottes de mailles et montés sur des chevaux bardés.
Il ordonna à Nestouh de monter à cheval et le héros s’arma pour cette course et partit le cœur’rempli de soucis, car il n’était pas l’égal de Bahram au jour du combat.
Bahram de même, à la tête de ses troupes, n’était pas sûr de leur fidélité ni de celle du pays ; il courut par des chemins détournés. le cœur rempli de terreur et emportant avec lui son or et son argent.
Yelan Sineh et Ized Guschasp chevauchè-rent à côté de la troupe et la conduisirent par les mêmes chemins en récitant les histoires des anciens rois.
On vit de loin un village misérable et peu propre à recevoir un grand seigneur ; mais Bahram
Y poussa son cheval le premier, plein de repentir et le cœur rempli de chagrin et gonflé de sang.
Ils avaient tous la bouche desséchée par la soif et Bahram entra dans la maison d’une vieille femme.
Ils s’appliquèrent à parler avec douceur et lui demandèrent de l’eau et du pain.
La vieille femme les écouta, plaça devant eux un vieux sas, étendit par terre un sac de cuir tout déchiré et plaça du pain d’orge sur le sas.
Yelan Sineh remit le Barsom à Bahram, mais dans leur chagrin ils oublièrent les prières.
Ayant mangé le pain d’orge, ils demandè- orent du vin et se mirent à prier à voix basse.
La vieille femme dit :
Si vous voulez du vin, il y en a et j’ai aussi une vieille courge dont j’ai coupé le haut quand elle était fraîche ; j’en ai fait une coupe et je l’ai placée sur le vase qui contient le vin. »
Bahram répondit :
Pourvu qu’il y ait du vin, qu’est-il besoin d’une coupe plus belle ?-n La vieille alla chercher le vin et la coupe et Bahram s’en réjouit. *
Il plaça dans la main de la vieille une coupe pleine pour qu’elle se réjouît aussi et il lui dit :
Ô mère vénérable, quelle nouvelle as-tu des affaires du monde. »
La vieille femme répondit :
J’ai entendu tant de choses que mon cerveau en est fatigué.
Il est venu aujourd’hui beaucoup de personnes de la ville qui ont parlé de la guerre de Djoubineh et ont dit que son armée s’était réunie Ml à celle du roi et que le Sipehbed s’était enfui avec une escorte. »
Bahram lui dit :
Ô sainte femme, ne me fais pas de contes lia-dessus ; c’était dans les calculs de Bahram. ou il aura préféré ses fantaisies à ses calculs. »
La vieille dit :
Ô homme illustre !
Comment le Div a-t-il troublé la vue ?
Ne sais-tu pas que depuis que Bahram, fils de Guschasp, a lancé son cheval contre le fils de Hormuzd, tous les hommes de sens en rient et personne ne le compte plus parmi les grandsn Bahram répondit :
S’il a envie de boire du.viu dans une courge, tiens prêt du pain d’orge sur ce vieux sas, jusqu’à ce que la nouvelle orge soit moissonnée. »
La nuit venue, il se coucha dans ce lieu sombre, ayant pour se couvrir sa tunique et appuyant son épaule sur sa cuirasse ; mais le sommeil ne lui vint pas et il ne trouva pas de repos.
C’était un homme qui cherchait l’accomplissement de ses désirs et rencontrait le désappointement.
Lorsque le soleil dévoila son secret sur la voûte du ciel, le Sipebdar fit battre le rappel, réunit ce qu’il avait de troupes et ces hommes illustres se mirent en roule.
Sur son chemin se trouvait un beau champ de roseaux et beaucoup d’hommes y étaient occupés à les couper.
Lorsqu’ils virent de loin Bahram et sa grande et vaillante troupe, ils lui dirent :
Puisses-tu vivre toujours !
Pourquoi as-tu pris la route du champ de roseaux ?
Il y a la Un
M2 -DES sors. devant toi une troupe nombreuse d’hommes qui ont tous lavé leurs mains dans le sang pour se préparer au combat. »
Bahram dit :
Il ne peut y avoir ici que des cavaliers de l’armée du roi.
J’ai appris que le roi, lorsque nous nous sommes décidés à quitter lienceinte de mes tentes et à nous préparer pour la route, chargea Nestouh de nous suivre en toute hâte avec une armée qui doit nous attaquer en masse ; mais si je le vois, je mettrai fin à sa vie. »
Il ordonna de serrer les sangles des chevaux et parcourut tous les rangs de ses troupes ; ses cavaliers serrèrent rapidement les sangles des selles, saisirent leurs épées indiennes, mirent le feu dans tout ce champ de roseaux et détruisirent entièrement cette armée ; tout le champ s’étant enflammé, les uns y furent tués, les autres y furent brûlés.
Lorsque le vaillant Bahram vit Nestouh, il rendit la bride à son destrier ardent, enleva de son cheval Nestouh dans le nœud du lacet et on lia ses mains impuissantes.
Nestouh demanda grâce à Bahram, disant :
Ô roi illustre !
Pourquoi verserais-tu mon sang ?
Aie pitié de ma fortune renversée, ne me tue pas, pour que je puisse m’approcher de toi en courant et être ton humble pauvre. »
Bahram dit :
C’est d’autres ennemis que des gens comme toi que je désire rencontrer sur le champ de bataille.
Je ne te couperai pas la tête, cela me ferait honte (ravoir été combattre un cavalier tel que toi.
Maintenant M3 que je le lâche de mes mains, cours et va raconter à Khosrou tout ce que tu m’as vu faire. »
Nestouh, à ces paroles, baisa la terre et le bénit à plusieurs reprises.
Bahram quitta le champ de roseaux et marcha vers Reî avec ses compagnons vaillants et fortunés ; il y resta et s’y reposa, puis il repartit et se ’ lendit en toute hâte auprès du Khakan.
Dernière mise à jour : 7 sept. 2021