Keï Kaous

Rustem demande un baume à Kaous

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Alors Rustem dit à Gouderz :

Ô puissant héros à l’âme brillante !

Porte un message de moi à Kaous ; raconte-lui quel malheur m’a frappé et dis-lui :

J’ai déchiré avec le poignard la poitrine de mon vaillant fils, périsse ma main !

Si tu as souvenance de ce que j’ai fait pour toi, montre une seule fois un cœur compatissant à ma détresse.

Envoie-moi de ce baume qui se trouve dans ton trésor et qui guérit les blessés, envoie-le-moi en toute hâte avec une coupe de vin.

Il se peut que Sohrab guérisse par ta grâce et qu’il devienne, comme moi, un des esclaves qui se tiennent devant ton trône. »

Le Sipehdar partit rapide comme le vent et porta le message à Kaous.

Le roi lui répondit :

Qui d’entre le peuple est plus honoré que Rustem ?

Je ne voudrais pas qu’il lui arrivât malheur, car j’ai pour lui un grand respect.

Mais si je lui donne mon baume, son fils au corps d’éléphant restera en vie, il servira d’appui à Rustem et le rendra plus puissant et sera sans doute la cause de ma mort.

Et si jamais il me fait du mal, pourrai-je le punir un comme il l’aura mérité.

Tu as entendu comment Rustem a dit :

Qu’est ce que Kaous ?

Encore pourtant est-il roi : mais qu’est-ce que Thous ?

Qui est-ce qui contrebalancera dans le monde un homme qui a cette poitrine et cette force, ces bras et ces pieds ?

Comment se tiendrait-il humblement devant mon trône, comment marcherait-il sous mon aigle royal, lui qui m’a défié avec tant d’injures, qui m’a déshonoré à la face de mon armée ?

Si son fils reste en vie, ma main sera remplie de poussière.

N’as-tu pas entendu les paroles de Sohrab ?

N’es-tu pas un grand qui connaît le monde ?

Il a dit qu’il couperait la tête à mille Iraniens et qu’il pendrait Kaous vivant au gibet.

S’il vit, les grands et les petits plieront devant lui.

Quiconque aide à sauver son ennemi donne au monde une mauvaise opinion de lui -même. »

Gouderz l’écoute et s’en retourna sur-le-champ ; il arriva auprès de Rustem, courant comme la fumée et lui dit :

La mauvaise nature du roi est comme la coloquinte, qui ne cesse jamais de porter du fruit.

Sa dureté est cause qu’il n’a aucun ami dans le monde et jamais il n’a fait un sacrifice pour soulager la peine d’un homme.

Va toi-même auprès de lui et tâche d’éclairer son âme noire. »

Dernière mise à jour : 7 sept. 2021