Il y avait une jeune fille de race royale qu’on nommait Pouran ; quoique les affaires aillent mal sous la domination d’une femme, on la plaça sur le trône et les grands répandirent des pierreries sur elle.
Pourandokht parla ainsi :
Je ne ferai rien qui puisse mener à la dispersion du peuple.
Ceux qui sont pauvres, je les rendrai riches et je puiserai dans mon trésor afin qu’ils ne restent pas dans la détresse.
À Dieu ne plaise qu’il y ait dans le monde un seul malheureux, car sa souffrance me deviendrait funeste !
Je bannirai du pays les hommes à mauvaises intentions et j’ordonnerai ma cour selon les usages antiques des rois.
Elle rechercha les traces de Pirouz, fils de Khosrou et quelqu’un lui en fournit tous les indices certains.
Aussitôt que cette nouvelle parvint à Pourandokht, elle choisit dans l’armée un homme illustre, et, faisant amener Pirouz devant elle, elle lui dit :
Homme criminel et avide de vengeance, tu vas recevoir le châtiment de tes méfaits, tel que le mérite un scélérat ; tu subiras maintenant la peine de ton crime et je ferai couler de tes membres des torrents de sang.
Par son ordre, on tira de ses écuries un jeune cheval qui n’était pas encore dressé ; Pirouz fut attaché comme une pierre sur ce cheval sans selle, le licou passé autour de son cou.
La femme vengeresse fit conduire le cheval sur la place publique ; elle y envoya quelques cavaliers portant au crochet de la selle leurs lacets enroulés, et les chargea de voir comment le cheval emportait Pirouz, le heurtait de temps en temps par terre et se roulait lui-même sur le sol, au bruit de leurs acclamations.
Enfin le corps de Pirouz fut mis en lambeaux, le sang coula peu à peu et le misérable expira.
Comment peux-tu compter sur la justice quand tu as commis l’injustice ?
Cette femme gouverna le monde par la douceur et le vent du ciel ne troubla point la poussière ; mais lorsque six mois de son règne furent passés, le cercle que traçait sa vie dévia tout à coup ; Pouran fut malade pendant une semaine et mourut en emportant avec elle un renom de bonté.
Telle est la loi du ciel qui tourne : il est maître de toutes choses et nous sommes impuissants.
Dernière mise à jour : 7 sept. 2021