Le sage roi se décida à quitter pour un peu de temps le pays où il résidait à faire le tour de ce monde plein de joies et à tirer au jour les choses cachées.
Il fit battre les timbales et se mit en marche avec son armée, étonnant la lune et le soleil par sa pompe ; il y avait tant (l’étendard ; à emblèmes, tant d’or et d’argent, tant de ceintures d’or et de boucliers d’or, qu’on aurait dit qu’il ne restait rien dans les mines, qu’il ne restait plus de perles de belle eau et de pierres fines.
Il partit pour le Khorasan, prenant ses aises et conduisant l’armée d’après la manière des Sassanides ; quand il traversait un pays habité, il dressait l’enceinte de ses tentes et le camp dans la campagne et chaque fois qu’on sonnait des trompettes, un héraut le précédait proclamant :
Ô sujets du roi du monde !
Qui ânons vous ferait du mal en secret ?
Dormez avec confiance dans le roi, .ne tourmentez pas votre âme par des soucis ! »
C’est ainsi qu’il conduisit son armée à Gourgan, portant M3 avec lui sa couronne et son trône.
Sache que jamais la justice ne produit de dommage, mais il faut que le roi soit habile, sage et de grande naissance.
De Gourgan, ils marchèrent à Sari et Amol ; ilsy allèrent dans la saison du chant du rossignol.
Les vallées et les plaines étaient couvertes de forêts et cet aspect fit réfléchir le roi d’Iran.
Il monta de la plaine sur une haute montagne, assis sur un cheval arahe bai ; il regarda le haut de la montagne et ces forêts ; il y vit des roses, des jacinthes, des eaux et des bêtes fauves et dit :
Ô Seigneur et créateur, maître du monde, victorieux, père nourricier de toutes les créatures !
Tu as créé le soleil et la lune, tu as ouvert la vraie voie et l’as montrée ; tu as créé un monde si beau qu’on ne peut distinguer la terre du ciel et quiconque adore un autre que toi dirige son âme vers l’enfer.
C’est donc pour cela que Feridoun, le serviteur de Dieu, a fait de ce coin du monde sa résidence. »
Un homme lui dit :
Ô dispensateur de la justicel si les Turcs ne pouvaient. pas passer par ici, notre cœur pourrait jouir de la richesse et de la magnificence de ce pays ; mais nous n’osons pas relever la tète, tant il y a de meurtres, de ravages et d’incursions ; ils enlèvent tout, que cela vaille beaucoup ou peu. les oiseaux, les hommes et le bétail.’(2’est là le seul chemin par lequel les maux se répandent dans l’Iran, de province en province ; cela a donné lieu,
dans les temps anciens, à beaucoup de luttes et de guerres, mais la route du Kharezm a toujours servi de passage aux Turcs.
Aujourd’hui un Dihkan ou un marchand qui lèverait la tête contre eux la perdrait inutilement ; mais puisque tu as amené une armée, détourne de nous le mal et ferme cette route.
Ton trésor n’en souffrira pas, car il augmente toujours ; c’est ici qu’il faut se montrer généreux. »
Les larmes coulèrent des yeux du roi lorsqu’il entendit les paroles de l’homme qui invoquait son aide et il dit à l’instant à son Destour :
Nous avons devant nous une affaire difficile et il ne serait pas séant de nous livrer dorénavant aux jouissances ou de nous contenter d’occuper le trône.
Dieu n’approuverait’pas cette énormité, que nous fussions dans la joie et les Dihkans dans la peine.
Ces belles montagnes et ces larges plaines, que devraient occuper des jardins, des places publiques etïdes palais et qui sont remplies de bétail, de bêtes fauves et d’eaux courantes dont l’aspect rafraîchit les âmes, tout ce pays, je ne le laisserai pas devenir un désert, je ne laisserai pas dévaster une province de l’Iran.
Mess devoirs de roi, la raison, l’honneur et l’humanité ne le permettent pas et personne ne me bénirait si le pays d’Iran devenait déserta Il donna ses ordres au Destour, disant :
Choisis dans l’Inde et en Chine les hommes les plus connus dans ces pays ; prends dans toutes les parun ties du monde des hommes ingénieux qui soient maîtres en cette matière et construis un puissant mur qui doit sortir de l’eau, avec une base large et une hauteur de dix longueurs de lacet ; il faut qu’il s’élève de l’eau profonde, bâti en pierre et en mortier et monte jusqu’au soleil.
J’espère qu’en créant cet obstacle nous empêcherons nos ennemis de faire du mal à l’Iran.
Mais il ne faut pas employer pour cela du travail forcé ; paye ce qu’on te demandera et ouvre mon trésor.
Il faut que le laboureur, le Dihkan et l’homme de haute naissance soient également préservés du souffle du venlm Un vieux Mobed exécuta ces ouvrages et plaça tout le désert en dehors du mur ; on y construisit une forte porte en fer et les brebis furent garanties des attaques du loup ; le .roi établit des gardiens dans tout ce pays et quand tout fut en sécurité, il emmena l’armée.
Dernière mise à jour : 26 sept. 2021