Puis le roi fit une réponse à la lettre de Sam et la rédigea dans les termes les plus gracieux :
Ô brave Pehlewan, de grand renom, toujours victorieux et semblable à un lion !
Le ciel qui tourne ne connaît point ton égal dans le combat ni dans les fêtes, en sagesse ni en beauté.
Ton fils fortuné, Zal le brave qui étonne les lions au jour du combat, le vaillant, le courageux, le héros, le cavalier, qui laissera un souvenir dans le monde, est venu auprès de moi ; j’ai été informé de tes désirs, de tes demandes, de tes desseins et des moyens de te rendre le repos.
Je lui ai accordé tout ce qu’il désire et j’ai passé avec lui beaucoup de jours heureux.
Un lion qui fait sa proie du léopard, que peut-il produire qu’un lionceau qui rugit dans le combat ?
Je l’ai renvoyé satisfait ; puissent ses ennemis être impuissants à lui nuire !
Zal se mit en marche, rempli de bonheur et levant la tête au-dessus des braves de son armée.
Il envoya un messager à Sam pour lui dire :
Je quitte Minoutchehr le cœur en joie, avec des présents dignes d’un roi, une couronne, des bracelets, des colliers et un trône d’ivoire.
Je me rends en toute hâte auprès de toi, ô mon père glorieux et plein de tendresse !
Le Pehlewan en fut si heureux, que malgré sa vieillesse il se sentit rajeuni.
Il envoya tout de suite un cavalier à Kaboul pour qu’il apprit à Mihrab ce qui s’était passé et comment le roi de la terre avait rétabli le bonheur qui avait disparu, en ajoutant :
Aussitôt que Destan sera revenu, nous irons tous les deux auprès de toi, comme c’est notre devoir.
Le messager arriva promptement à Kaboul et fit au roi le récit de ce qui était arrivé.
Le roi de Kaboul eut une telle joie de son alliance avec le soleil du Zaboulistan, qu’un mort en serait revenu à la vie et qu’un vieillard en serait redevenu jeune.
On appela de tous côtés des chanteurs, tu aurais dit que tous versaient leurs âmes.
Mihrab dans son bonheur et dans sa joie, le cœur plein de contentement et le sourire sur les lèvres, appela la noble Sindokht et lui adressa mainte douce parole, en disant :
Ô ma compagne remplie d’intelligence !
C’est ton conseil qui a éclairé ces ténèbres ; tu as saisi une branche à laquelle tous les rois de la terre rendront hommage.
Maintenant, il faut tâcher de finir comme tu as commencé.
Tous mes trésors sont à tes ordres, que ce soit mon trône, ou ma couronne, ou mes joyaux.
Sindokht ayant entendu ces paroles, le quitta et alla auprès de sa fille pour lui révéler le secret.
Elle lui annonça qu’elle allait voir Zal et lui dit :
Maintenant que tu as trouvé un époux digne de toi, il faut que tous, hommes et femmes, à cause de la grandeur des désirs que tu as conçus, renoncent à te faire des reproches.
Tu t’es précipitée vers l’objet des désirs de ton cœur et maintenant tu obtiens tout ce que tu as souhaité.
Roudabeh lui répondit :
Ô compagne du roi !
Tu es digne d’être révérée par le peuple entier ; je ferai ma couche de la poussière de tes pieds, c’est selon tes ordres que je réglerai mon culte.
Puisse l’œil des Ahrimans ne pas le frapper !
Puissent ton cœur et ton âme être comme une maison de noces !
Sindokht écouta les paroles de sa fille et se mit à décorer le palais ; elle arrangea la salle du roi comme un gai paradis, mêla du vin avec du musc et avec de l’ambre, étendit un tapis couvert de figures d’or et brodé partout d’émeraudes et un autre brodé de perles de belle eau, dont chacune était comme une goutte d’eau pure ; elle plaça dans la salle un trône d’or, elle le plaça et l’orna selon la mode de la Chine, un trône dont toutes les figures étaient de pierreries, sur lequel des sculptures remplissaient les intervalles des joyaux et dont les degrés étaient de rubis, car c’était un trône de roi et plein de magnificence.
Sindokht para Roudabeh comme un paradis et la couvrit d’un grand nombre de talismans écrits.
Elle la fit asseoir dans ce palais doré et ne voulut que personne eût accès auprès d’elle.
Tout le Kaboulistan était orné et rempli de couleurs, de parfums et de choses précieuses ; on jeta des caparaçons sur le dos de tous les éléphants, on les couvrit de brocarts de Roum.
On plaça sur leur dos des musiciens et tous les hommes se posèrent un diadème sur la tête.
On se prépara pour aller au-devant de Zal, on choisit les esclaves qui devaient répandre du musc et de l’ambre, étendre des tapis de soie et de poil de castor, verser sur les têtes des émeraudes et de l’or et arroser la terre d’eau de rose et de vin.
Dernière mise à jour : 7 sept. 2021