Le quatrième jour ils firent les apprêts du départ, car le temps était arrivé.
Rustem ordonna qu’on chargeât les bagages et qu’on préparât tout ce qu’il fallait pour le voyage de l’Iran.
Les cavaliers de son royaume qui portaient le plus haut la tête étaient rassemblés devant sa perle, prêts pour la marche ; il parut lui-même, monta sur Raksch, mit sa ceinture, revêtit une tunique de Roum, suspendit à’sa selle la massue de son grand-père, le cœur rempli d’ardeur pour le combat, la tête pleine de ruses.
Les oreilles de Raksch touchaient le ciel et le héros qui distribuait des couronnes élevait la tête plus haut que le soleil.
On chargea tout ce qu’il fallait emporter ; Rustem laissa Faramourz dans le Zaboulistan et se mit en route pour le pays d’Iran, avec Guiv et cent cavaliers du Zahoulistan armés pour la guerre et les combats ; ils étaient impatients d’arriver car leur cœur était plein du désir de la vengeance.
Lorsque Rustem s’approcha de l’Iran, le trône de Khosrou devint visible ; et une brise douce porta gaiement au héros les saluts affectueux du firmament.
Guiv s’adressa à Rustem et lui dit :
Je vais te devancer, ô vaillant chef de l’armée, pour annoncer au roi que l’incomparable Raksch est arrivé au terme de sa route. »
Rustem lui répondit :
Pars et sois heureux.
Parle au roi et bannis loin de toi les soucis. »
Guiv partit pour aller porter son message au roi dont le cœur était pur et la voie sainte.
Arrivé auprès de Khosrou, il célébra longuement ses louanges et lui rendit hommage.
Le roi demanda à Guiv fils de Gouderz où était demeuré Rustem et comment il avait fait le voyage.
Guiv lui dit :
Ô roi illustre, tout ce que tu désires s’accomplira, grâce à ta fortune ; Rustem n’a point refusé d’obéir à les
ordres ; j’ai trouvé son cœur dans les chaînes de la fidélité au roi.
Lorsque je lui ai remis ta lettre, il l’a portée à ses yeux et à son front ; il a lié les rênes de Bakech aux rênes de mon destrier, commec’était le devoir d’un serviteur de Khosrou.
Maintenant j’ai pris les devants pour annoncer au roi que Tehemten s’avance sur la route. »
Le roi lui dit :
A quel endroit se trouve Rustem le soutien du pouvoir et la semence de la royauté ?
Il est de mon devoir de l’honorer, car c’est un homme qui brille par ses vertus et par son dévouement au roi. »
Guiv répondit au roi digne d’occuper le trône :
Je l’ai devancé de deux journées pour t’annoncer son arrivée. »
Khosrou ordonna alors à ses conseillers, aux princes de sa famille et aux nobles d’aller avec un cortège à la rencontre de Rustem, qui arrivait selon les ordres qu’il lui avait donnés.
On avertit Gouderz fils de Keschwad, Thous chef de la famille de Newder et Ferhad.
La plupart des héros pleins de fierté, portant haut la tête et accentumés à tuer les ennemis du roi, se levèrent à l’instant, comme le voulaient les coutumes établies par Kaous et formèrent le cortège qui devait aller au- devant de Rustem.
Le monde devint violet par la poussière que soulevaient les cavaliers, les destriers hennissaient et les drapeaux brillaient.
Arrivés au-V près de lui, les grands mirent pied à terre et le saluèrent ; le Pehlewan du monde descendit de cheval, les héros accoururent vers lui et il adressa à chacun des questions sur le roi et sur le sort que leur avait amené la rotation du soleil et de la lune.
Ensuite Rustem et les héros remontèrent à cheval, semblables au brillant Aderguschasp et se rendirent auprès du roi, l’illustre Rustem marchant le premier.
Arrivé en présence du roi qui chérissait ses sujets, Rustem courut vers lui et lui offrit ses hommages ; il s’approcha de lui en le bénissant, car Khosrou était digne de bénédictions et d’amour.
Ensuite, il releva la tête. le salua et dit :
Que la fortune t’accompagne toute l’année ; qu’Ormuzd te maintienne dans ta dignité, en te donnant Bahman pour gardien du trône et du diadème ; qu’Ardibehischt ne cesse de t’être favorable ; que Bahram et Tir veillent sur toi ; que Schahrir te donne la victoire, un grand nom, de la splendeur et de la bravoure ; que Sipendarmed te préserve de tout mal ; que l’intelligence soit la demeure de ton esprit brillant;que Deï et Ferwerdin répandent sur toi leurs faveurs ; que la porte de tout mal soit fermée pour toi ; qu’Ader rende brillants tes jours et tes nuits ; que tu sois heureux et que ta couronne illumine le monde ; qu’Aban te fasse réussir en toutes choses ; que le ciel qui tourne soit ton esclave ; que Murdad garde tes troupeaux ; que tu fleurisses à jamais toi et ta race ; que Khardad fasse prospérer ton pays ; que ta fortune grau : -disse chaque mois de l’année. »
Quand Rustem eut ainsi comblé Khosrou de ses louanges et de ses bénédictions, le roi des rois lui assigna une place à côté de lui et lui dit :
Sois le bienvenu et que tout danger reste loin de ta vie.
Tu es le champion des rois de la terre ; ce que cachent les autres n’est pas un mystère pour toi et ce que tu ne caches pas est un mystère pour eux.
Tu es l’élu des Keïanides et le soutien de leur armée ; tu es le gardien de l’Iran et l’asile de ses braves.
Je suis heureux de te voir et de te voir si vaillant et si vigilant.
Zewareh, Faramourz et Destan fils de Sam se portent-ils bien ?
Quelles nouvelles as-tu à m’en donner ? »
Rustem se prosterna à terre, baisa le trône et dit :
Ô roi illustre, à qui la fortune donne la victoire !
Par ta grâce tous les trois sont heureux et en bonne santé.
Béni est celui dont le roi daigne se souvenir. »
Dernière mise à jour : 7 sept. 2021