Le cœur du vieux roi rajeunit par ces nouvelles ; tu aurais dit qu’il en avait grandi.
Il fit placer des trônes d’or dans les salles d’audience et fit parer son palais d’ornements chinois.
On prépara des fêtes dans les campagnes et sur la route ; on pavoisa partout les maisons, les rues et les marchés.
Tous les grands et les puissants, tous les gouverneurs des villes allèrent au-devant de Khosrou ; partout on érigea des arcs de triomphe et le monde ressemblait à du brocart d’or ; partout on mêla du musc et des pierreries et on les versa sur les têtes du haut des arcs.
Keï Kaous sortit de la ville avec les héros aux traces fortunées ; le jeune roi aperçut au loin son grand-père ; il lança son cheval ardent, Kaous et lui s’embrassèrent et le grand-père le baisa à plusieurs reprises sur la tête et sur les joues.
Tous les deux versèrent des larmes amères d’avoir vécu si longtemps presque sans espoir de se revoir.
Keï Kaous célébra les louanges de ce prince heureux, dont les traces étaient fortunées, disant :
Puissent le monde, le trône du pouvoir et la place des rois n’être jamais privés de toi !
Jamais le soleil n’a vu un prince comme toi, ni une cuirasse, ou un cheval, ou un casque comme w les tiens.
Le ciel et la terre n’ont pas vu une royauté comme la tienne depuis que le pouvoir est descendu de Djemschid àFeridoun.
Aucun prince n’a supporté autant de fatigues et n’a vu comme toi tout ce qui est connu et ce qui est secret sur la terre.
Puisses-tu rendre heureux le monde brillant !
Puissent le cœur et l’âme de ton ennemi périrI Puisse Siawusch revenir, fût-ce pour un seul jour !
Ta gloire comblerait tous ses vœux. »
Le prince lui répondit :
Tout cela est dû à ta fortune ; une branche de ton arbre a porté fruit. »
Le grand-père baisa Khosrou sur la tête et sur les lèvres, disant :
Puisses-tu ne jamais me quitter, ni jour ni nuit !
A Khosrou fit apporter des chrysoprases, des rubis et des pièces d’or et les versa sur la tête du roi, jusqu’à ce que cette offrande couvrît entièrement les pieds du trône incrusté de pierres fines.
Kaous fit entrer la cour et placer des tables dans une autre salle ; et les grands, comblés de richesses, s’assirent avec lui dans la salle dorée des festins.
Le jeune roi raconta les merveilles qu’il avait vues sur mer et celles que ses grands lui avaient racontées.
Il parla de la mer et de Gangue Diz et à ses récits’les héros soupiraient après cette belle ville, ces plaines et ces vallées, ces prairies et ces jardins brillants comme des lampes. il :
A Keï Kaous resta dans l’admiration de son petitfils et commença à comprendre la grandeur de ses actions ; il lui dit . :
Les paroles jeunes d’un jeune roi rajeunissent le jour et la lune.
Personne n’a vu dans le monde’un roi comme toi, aucune oreille n’a jamais entendu de pareils récits.
Maintenant célébrons cette nouvelle étoile, célébrons tous Khosrou, la coupe en main. »
Il fit orner la salle dorée des festins, apporter du vin et appeler des échansons aux Ièvres de rubis.
Pendant sept jours le vin’ coula à flots des coupes dans le palais de Keï Kaous ; le huitième jour le roi ouvrit ses trésors et récompensa, selon les degrés, les fatigues que ces hommes avaient éprouvées.
Aux grands qui n’avaient pas quitté Khosrou dans les combats et dans les fêtes, dans la joie et dans le chagrin, on prépara des présents selon leur mérite et l’on choisit ce qu’il y avait de plus précieux dans le trésor.
Chacun partit pour sa province, portant haut la tête et accompagné d’une armée glorieuse.
Ensuite le roi s’occupa des troupes et leur distribua la solde d’une année.
Alors le grand-père et le roi qui ambitionnait la possession du monde s’assirent seuls pour tenir conseil.
Khosrou dit au roi Kaous :
À qui pouvons-nous demander la direction si ce n’est au Créateur ?
Moi et mon armée avons parcouru, le cœur blessé, les déserts, les montagnes et une mer qui exige une année de traversée ; mais nous n’avons trouvé aucune trace d’Afrasiab, ni dans les plaines, ni dans les montagnes, ni sur l’eau.
S’il parvient pour un moment à rentrer à Gangue, une armée se rassemblera autour de lui à l’instant de tous les côtés et nous aurons devant nous les mêmes travaux et les mêmes fatigues, quand même Dieu nous donnerait la victoire. »
Le grand-père répondit à son petit-fils par un sage conseil de vieillard, disant :
Courons nous deux à cheval au temple d’Aderguschasp.
Nous laverons nos têtes et nos corps, nos pieds et nos mains, comme c’est la coutume des hommes qui adorent Dieu.
Nous offrirons en secret nos hommages à Dieu en murmurant des prières : Nous nous tiendrons debout devant le feu, avec l’espoir que Dieu le très-saint nous guidera et que celui qui montre le chemin de la justice nous indiquera la route qui conduit au lieu de refuge d’Afrasiab. »
Ils convinrent de ce plan et ils l’exécutèrent sans se détourner du chemin droit.
Ils montèrent à cheval en toute hâte et coururent au temple d’Aderguschasp ; ils y entrèrent vêtus de robes blanches, le cœur tremblant et pourtant plein d’espérance ; en voyant le feu, ils versèrent des larmes, puis ils s’approchèrent et répandirent dessus des pierreries.
Ces deux rois y demeurèrent en gémissant, en pleurant et dans la douleur qui remplit les suppliants ; ils adressèrent des prières au Créateur, ils versèrent in.
Lôü des pierreries sur les Mobeds et Khosrou, les joues inondées de larmes qui coulaient de ses cils, couvrit de pièces d’or le Zendavesta.
Ils restèrent ainsi une semaine devant Dieu ; mais ne crois pas qu’ils adorèrent le feu, car le feu, dans ce temple, n’était que le lieu vers lequel on se tourne dans la prière.
Les yeux des adorateurs étaient remplis de larmes.
Si profondes que soient tes pensées, tu as toujours besoin de Dieu le très-saint.
Le roi et les nobles passèrent un mois dans le temple d’Ader Abadgan.
Dernière mise à jour : 7 sept. 2021