Keï Khosrou

Afrasiab s'enfuit devant Rustem

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Piran dit à Afrasiab :

La surface du pays est comme une mer de sang.

Ne t’ai-je pas dit que nous ne pouvions rester en sûreté dans ce pays en face de Rustem le maudit ?

Tu as blessé nos cœurs comme avec le fer d’une flèche, en versant inexorablement le sang de Siawusch.

Maintenant que deviendras-tu ?

Il ne reste plus personne auprès de toi ;

Poulad est parti et a emmené son armée.

Les Iraniens sont plus de cent mille, tous montés sur des chevaux bardés et à leur tête marche Rustem le vainqueur des lions ;

La terre est pleine d’ennemis et l’air rempli de flèches.

Nous avions réuni toutes les troupes que pouvaient fournir la terre ferme et les pays au-delà de la mer, les plaines et les montagnes ;

Quand les hommes n’ont pas suffi, nous avons essayé des Divs ;

Et c’est ainsi que nous avons pu livrer ces batailles et produire un si grand tumulte.

Mais puisque Rustem est arrivé, tu ne peux résister ;

Il ne te reste qu’à t’enfuir et à te retirer sur le bord de la mer de la Chine, car tu es le trésor du monde.

Laisse ici ton armée rangée en bataille et gagne avec tes amis le bord de la mer.

Le roi fit ce que lui conseillait Piran, car il voyait que dans ce combat sa main était impuissante.

Il laissa donc en place son drapeau et partit lui-même, se dirigeant en toute hâte vers la Chine et le Madjin.

Cependant, les deux armées s’avancèrent l’une contre l’autre ;

Le monde ressemblait à un nuage noir.

Tehemten s’écria à haute voix :

Ne vous servez pas de lances, d’arcs et de flèches, combattez avec les épées et les massues et frappez de toute la hauteur de votre stature.

Les léopards assouviront aujourd’hui leur rage, car la proie viendra les trouver jusque dans leur repaire.

Toute l’armée répondit par un cri, les cavaliers élevèrent leurs lances au-dessus des montagnes et bientôt le champ de bataille fut tellement encombré de morts qu’on n’y pouvait plus passer.

Une moitié des Touraniens vint demander grâce, l’autre se précipita sur les routes en fuyant ;

C’était un troupeau sans pâtre et tout dispersé et la plaine ne présentait qu’une masse de corps privés de leurs mains et de leurs bras.

Rustem dit :

Assez de carnage !

La fortune est le partage tantôt de l’un, tantôt de l’autre ;

Tantôt elle porte un fruit vénéneux,tantôt elle te donne de la thériaque.

Dépouillez-vous tous de vos armures et mettez-vous à votre aise.

Pourquoi attacher son cœur à cette demeure passagère dont les plus savants mêmes ne pénètrent pas les secrets ?

Aujourd’hui le monde t’attaque comme un Ahriman, demain il se montre comme une fiancée parée et remplissant l’air de parfums.

Contente-toi de vivre obscur et de ne pas souffrir ;

Car qui peut dire s’il vaut mieux être béni par le sort que d’en être maudit.

Rustem se mit à distribuer sur la plaine tout le butin ;

Il envoya au roi une partie de l’or et des vêtements neufs ;

Il lui envoya les esclaves, les chevaux et les éléphants de guerre ;

Il prit pour lui-même tous les diadèmes, le musc et l’ambre et abandonna à l’armée tout le reste de ce qui s’était trouvé sur le champ de bataille.

Ensuite, il demanda si l’on avait découvert des traces du roi du Touran ;

On le chercha de tous côtés, sur les routes et à travers les lieux écartés ; mais personne ne put en donner de nouvelles, ni dans la montagne, ni dans la plaine, ni dans le désert, ni sur le fleuve.

Les Iraniens se mirent alors à détruire tous ses palais et sa résidence royale et Rustem dévasta par le feu toutes les villes habitées, de sorte que les flammes illuminaient le monde entier.

Dernière mise à jour : 19 déc. 2021