Lorsqu’il s’approcha de la ville de Semengan, le roi et les grands apprirent que Rustem le distributeur des couronnes venait à pied, Raksch s’étant enfui à la chasse.
Les grands et le roi, tous ceux qui portaient un diadème allèrent à sa rencontre ; et lorsqu’ils l’aperçurent, chacun dit :
Est-ce Rustem, ou est-ce le soleil du matin ?
Le roi de Semengan alla au-devant de lui, à pied, entouré de la foule de ses braves et lui adressa ces paroles :
Qu’est-il arrivé ? Qui a osé se mesurer avec toi dans le combat ?
Dans cette ville, nous sommes tous tes amis, tous debout pour attendre tes ordres et ta volonté.
Tu es le maître de nos personnes et de nos trésors ; le cœur des nobles et mon âme sont à toi.
Lorsque Rustem entendit ces paroles, il reconnut que le roi n’avait pas de mauvais desseins et lui répondit :
Mon cheval Raksch s’est éloigné de moi dans cette prairie, sans rênes et sans mors ; les traces de ses pieds vont de la rivière et des roseaux jusqu’à Semengan.
Si tu me le retrouves, tu en recevras mes remerciements et tu obtiendras la récompense due à ceux qui font le bien ; mais si Raksch ne se trouve plus, je trancherai la tête à beaucoup de grands.
Le roi lui répondit :
Ô héros plein de fierté !
Personne n’osera commettre ce crime contre toi ; sois mon hôte et ne t’abandonne pas à ton courroux ; tout se terminera selon tes vœux.
Allons passer la nuit à boire pour égayer notre esprit et délivrer notre cœur de ses soucis.
Il ne faut pas de colère ni de sévérité ; c’est par la douceur qu’on fait sortir le serpent de sa caverne.
La trace de Raksch ne peut rester cachée, tant il est célèbre dans le monde entier.
Nous le chercherons et te l’amènerons sans délai, ô homme plein de bravoure et d’expérience !
Rustem fut satisfait de ces paroles et il bannit tout soupçon de son esprit ; il se décida à se rendre au palais du roi et le cœur de son hôte se réjouit de cette bonne nouvelle.
Le prince le plaça sur le trône et se tint devant lui comme un esclave.
Il appela de la ville et de l’armée les grands et éloigna de sa vue tous ses ennemis.
Il ordonna aux cuisiniers d’apporter les tables et de les dresser devant les guerriers et pour conjurer le courroux de Rustem, il fit asseoir parmi les chanteurs des idoles de Tharaz aux yeux noirs et aux joues de rose, qui faisaient oublier le vin, les chansons et la musique.
Quand Rustem fut ivre, il voulut se coucher, impatient de quitter le banquet.
Le roi lui prépara un lieu de repos et de sommeil comme il convenait et y répandit du musc et de l’eau de rose.
Dernière mise à jour : 11 sept. 2021