Lorsque Iskender se fut approché de Four, il observa de loin ces cavaliers et cette armée.
Il s’éleva des deux côtés un bruit de guerre et la poussière des batailles et les héros avides de combat s’avancèrent.
On alluma le naphte qui remplissait les chevaux de fer et les Indiens se frappèrent le front d’étonnement.
Le feu alluma le naphte noir et ébranla toute cette troupe de fer ; l’armée indienne poussa un cri immense, on rendit furieux les éléphants par les coups de crochets ; mais quand ils saisirent avec les trompes ces cavaliers en flammes, leurs ’conducteurs restèrent confondus.
Toute l’armée des Indiens recula et les éléphants de guerre qui portaient haut la tête, quand ils furent ainsi repoussés par ces hommes de fer, se retirèrent en toute hâte avec les troupes.
Iskender se mit à la poursuite de l’armée ennemie rapidement comme le vent et continua ainsi jusqu’à ce que, l’air devenu sombre, l’armée ne pouvait plus combattre.
Alors le roi, ambitieux de la conquête du ’ monde, mit pied à terre avec les Roumis entre deux montagnes, envoyades, patrouilles de tous" côtés et eut soin que l’ennemi ne pût surprendre l’armée.
Lorsque le lingot d’or du trône brillant ’du soleil eut paru, le monde devint comme un cristal blanc ; le bruit des trompettes, des fifres et des clochettes . indiennes monta vers le ciel.
Les deux armées se pré. parèrent au combat ; elles élevèrent jusqu’aux nuages les pointes de leurs lances et Iskender s’avança au milieu des deux lignes de bataille, une épée roumie à la main.
Il envoya auprès de Four un cavalier, avecl’ordre de l’appeler et de lui crier de loin :
Iskender se présente sur le front de l’armée et désire obtenir un moyen de le voir.
Il te parlera et écoutera ce que tu diras et si tu parles selon la justice, il tombera d’accord avec toi. »
Four, en entendant ce message, s’avança et sortit rapidement du centre de son armée.
Iskender lui dit :
Ô roi se illustre !
Nos deux armées sont brisées par le combat : les bêtes fauves dévorent les cervelles des hommes et les sabots des chevaux broient leurs ossements.
Pourquoi serait ce toujours aux armées à se tuer ou à revenir quand elles survivent ?
Nous deux sommes braves et jeunes, des Pehlewans éloqueuta et hommes de sens.
Prenons donc nos armes et combattons-nous, puisqu’il faut décider qui. sera le maître de ce pays et quand l’un de nous sera victorieux, ces armées, ces éléphants et ce trône lui appartiendront. »
Four écouta le Roumi, accepta le marché du combat avec joie et répondit :
Ceci est conforme aux usages et à la raison ; nous nous battrons sans nos armées. »
Il voyait que lui-même était fort comme un lion et que le destrier sous lui était comme un dragon, pendant qu’Iskender était
Un cavalier mince comme un roseau, couvert d’une armure légère et monté sur un cheval allaibli.
Tous les deux saisirent de leurs mains les épées et s’avancèrent au milieu des deux armées.
Quand Iskender aperçut cet homme semblable à un éléphant furieux, monté sur un cheval comme une montagne et tenant en main une épée comme un dragon, il fut confus du combat qu’il avait à lui livrer, il eut peur pour sa vie ; mais il se roidit et s’élança vers lui sur le champ du combat.
Dam te moment il s’éleva sur les derrières de l’armée un grand cri qui inquiéta Four et lui fit tourner de ce côté la tête, les yeux et les oreilles.
Iskender s’avança au milieu de la poussière rapidement comme le vent, frappa ce lion d’un coup d’épée et lui trancha la tête et le cou au- dessus de la poitrine : le tronc tomba du haut du cheval sur la terre.
L’armée de Four poussa un cri qui montait au ciel et les héros Ide l’Iran accoururent.
Four avait une timbale en peau de lion dont le son traversait les nuages ; et le bruit de la timbale et dm clairons s’éleva, la terre se couvrit de fer et le ciel devint couleur ’ébène.
Les Indiens, avides de combat, s’approchèrent ; mais une voir : se fit entendre sur la plaine, disant :
Ô hommes de bien, vous qui êtes la fleur du pays de l’Inde, la tête de Four l’Indien gît dans la poussière et son corps d’éléphant est déchiré !
Pour qui combattriez-vous, pourquoi tous ces coups et tant de fracas ?
Iskender est devenu pour vous ce qu’était Four et c’est à lui qu’il faut demander maintenant des fêtes et des banquets. »
Les héros de l’Inde vinrent avec des clameurs universelles ; ils virent la tête de Four souillée de poussière et de sang et son corps déchiré par l’épée.
Un cri de douleur s’éleva de l’armée, tous jetèrent leurs armes et se rendirent auprès du Kaïsar avec des lamentations et la tête couverte de poussière.
Iskender rendit aux braves leurs armes et leur adressa des paroles bienveillantes de tout genre, disant :
Un homme est mort parmi les Indiens ; il ne faut pas que votre cœur s’abandonne aux inquiétudes.
Je vous accueillerai encore mieux que lui, j’écarterai de votre cœur les soucis et la terreur. »
De ce lieu il se rendit auprès du trône de Four et y monta ; d’un côté on ne voyait que douleur et deuil, de l’autre que fêtes et banquets.
Telle est la coutume de cette demeure passagère ; un jour elle le remplira de joie et l’autre de peine. louis donc de ce que tu possèdes et ne réserve rien pour après toi,-ce que tu as acquis avec peine, pourquoi le laisser à un autre ?
Le Kaïsar resta deux mois sur le trône et distribua à l’armée tout le trésor de Four.
Or il y avait un noble, un puissant Pehlewan du pays de l’Inde, son nom était Sawurg ; Iskender le plaça sur le trône de la royauté et lui dit :
Ne cache jamais ton or ; donne et jouis de tout ce qui te vient en mains.
Ne L’attache pas à cette couronne et à ce trône fugitifs ;v. tantôt c’est Iskender, tantôt c’est Four qui règnent, tantôt la douleur et la colère, tantôt les fêtes et les banquets. »
Sawurg distribua à son armée de l’or et de l’argent et rendit heureux les héros et le pays.
Dernière mise à jour : 19 déc. 2021