Ces prodiges multipliés augmentèrent l’estime que Guschtasp faisait de Zoroastre.
Ce Prince recevait ses instructions, écoutait ses avis, & le consultait sur tout ce qu’il avait à faire.
Un jour qu’ils conversaient ensemble, Guschtasp lui dit :
Vrai Prophète, j’ai quatre choses à demander à Dieu: je ne doute pas que vous ne puissiez facilement me les obtenir;
elles ne sont pas plus miraculeuses que l’excellente Loi que vous annoncez.
Zoroastre lui répondit:
Apprenez moi quelles sont ces quatre choses.
Guschtasp lui dit:
La première est que je voie le lieu qui m’est destiné dans l’autre Monde;
la seconde, que mon corps ne craigne rien de l’ennemi, qu’il soit à l’épreuve de ses armes; car je serai obligé de soutenir bien des combats, lorsque je ferai publier la Loi;
la troisième, que je sache tout ce qui arrivera de bien & de mal dans le Monde, que je connaisse exactement l’état de l'Univers;
& la quatrième, que mon âme reste dans mon corps jusqu’à la résurrection.
Zoroastre instruit de ce que Guschtasp désirait, lui dit:
Je demanderai ces quatre choses à celui qui vous à donné le bonheur dont vous jouissez: mais il faut que vous en choisissiez une pour vous, & les autres pour trois personnes distinguées de votre Cour;
car Dieu ne les accordera pas à un seul homme, de peur qu'il ne dise: je suis le Tout-puissant.
Guschtasp y consentit, & lui dit, qu'il désirait de voir le lieu de gloire qui lui était destiné dans le Ciel.
Zoroastre lui promit d’adresser pour cela sa prière à Ormuzd, & se retira dans son appartement.
Avant que de se coucher, il conjura Ormuzd de lui accorder ce que le Roi demandait: il fit pour cela les Néaeschs ordonnés par la Loi, & Dieu lui montra en songe ce qu’il désirait de savoir.
Dès que le jour parut, Guschtasp s’assit sur un Trône d'or, la tête couverte d’une couronne de même métal, & ornée de diamants.
Zoroastre s’approcha du Roi, le salua, & entra dans le Divan.
Il ne faisait que de s’asseoir, lorsque l'on vint annoncer qu'il y avait à la porte quatre cavaliers, armés de toutes pièces, couverts de cuirasses, & hauts comme des montagnes.
Qu'est-ce que cela, dit Guschtasp à Zoroastre?
À peine achevait-il ces paroles, que les quatre cavaliers revêtus d’habits de différentes couleurs, la lance à la main, & répandant la terreur, s’avancèrent vers le Trône du Roi.
L'un était Bahman 2 & l’autre Ardibehescht 3 suivi de Khordad 4 & d’Aderguschasp.
Ils dirent à Guschtasp:
Dieu nous a envoyés vers vous, Ô Roi des Villes, pour vous dire d’obéir à Zoroastre, de ne pas l’inquiéter, & vos souhaits seront accomplis;
vous serez préservé de l'Enfer;
car c’est moi, dit Ormuzd, qui ai envoyé Zoroastre: je lui ai soumis le Monde entier.
Ce spectacle & ce discours saisi d’effroi Guschtasp.
Il perdit pour quelque temps la parole & le sentiment.
Revenu à lui, ce Prince dit aux cavaliers:
Je suis le moindre des serviteurs d’Ormuzd.
Vous me voyez prêt à exécuter vos ordres.
Après cette réponse, les quatre cavaliers se retirèrent précipitamment comme la flèche partie de l'arc.
Toute la Cour était saisie de crainte.
Le Roi se levant dit à Zoroastre:
Pardonnez-moi le mal que je vous ai fait: je vous livre mon corps & mon âme, selon l'ordre d’Ormuzd.
Zoroastre lui répondit:
Ne vous inquiétez de rien; vous verrez ce que vous avez demandé.
Zoroastre célébra l'Office du Daroun, pour lequel il offrit du vin, des parfums, du lait & une grenade.
Ayant béni ces choses, en récitant l’Avesta en zend, il but du vin, & présenta la coupe au Roi qui but aussitôt, & s'endormit comme un homme ivre.
Ce Prince resta dans cet état pendant trois jours.
Son âme alla au Ciel près du Trône de Dieu, & y vit son Kerdar 5 pur & brillant, la place qui lui était destinée, & celle des Saints.
Zoroastre présenta ensuite le lait à Paschoutan 6, second fils de Guschtasp.
Ce jeune Prince le but, & devint immortel.
Il donna les odeurs à Djamasp, Ministre de Guschtasp, qui reçut en même temps toutes les Sciences, & connut ce qui devait arriver jusqu'à la résurrection.
Enfin il présenta plusieurs pépins de la grenade à Espendiar, qui les mangea; & fon corps devint comme une pierre & invulnérable: c'est pour cela qu'il a été appellé corps de cuivre (rouin tan).
Au bout de trois jours le Roi se réveilla & remercia Dieu, lui disant: Dieu des deux Mondes, jamais votre Empire ne finira.
Il appela ensuite Zoroastre, lui rapporta ce qu'il avait vû, & ordonna à tous ses Sujets d’embrasser sa Loi.
Alors Zoroastre étant assis sur un Trône élevé, le Roi lui dit:
Lisez-moi le Zend-Avesta, pour que tous mes doutes soient dissipés, & que je sache la Loi parfaitement.
Cette proposition remplit de joie le nouveau Prophète: il commença par invoquer le nom de Dieu, & lut au Roi plusieurs sections du Zend-Avesta.
A cette lecture les Dews effrayés s’enfuirent sous terre.
Dernière mise à jour : 7 sept. 2021