Schenguil répondit à ces paroles de Bahram :
Ce que tu dis n’est pas conforme à la raison.
Reste
ici pendant quelque temps et délasse-toi ; pourquoi prononcer des paroles inutiles ? »
On arrangea une salle de fête, on disposa tout ce qu’il fallait.
Bahram se reposa jusqu’au milieu du jour et lors. que le trône du soleil qui éclaire le monde fut arrivé au zénith, les serviteurs zélés du roi avaient, selon ses ordres, préparé un festin dans cette salle.
Lorsqu’on eut placé sa table devant Schenguil, il donna à quelqu’un ses ordres, disant :
Appelle cet envoyé du roi de l’Iran, c’est un homme éloquent, qui vient pour entamer une affaire ; amène de même tous ses compagnons et fais-les asseoir aux tables des grands. »
Bahram se pressa d’arriver, s’assit à la table, s’occupa à manger et ne parla point.
Lorsque le dîner fut fini, on forma une assemblée et l’on fit venir des musiciens et du vin : les parfums musqués du vin se répandirent et les hâtes se reposèrent sur des tapis de brocart d’or.
Lorsque les grands furent mis en gaieté par le vin et qu’ils ne pensèrent pas aux soucis du lendemain, Schenguil ordonna de faire venir deux hommes habiles à la lutte qui auraient pu se mesurer avec le Div.
Deux hommes jeunes et préparés à ce jeu arrivèrent, serrèrent leurs caleçons autour de la taille et firent effort l’un contre l’autre, luttant et se ployant l’un l’autre.
Bahram saisit la coupe de cristal, le vin jeta du
BAI-trouble dans son cerveau et il dit à Schenguil :
Ô roi !
Si tu le permets, je vais serrer mon cale-
çon ; quand je lutte avec un homme fort, je ne pense plus à, la débauche et à l’ivresse. »
Schenguil sourit et dit :
Lève-toi et si tu as le dessus, verse leur sang. »
À ces paroles, Bahram se leva, il ploya bravement la taille droite de :
lutteraa et en ayant saisi un au milieu du corps, comme un lion qui saisit un onagre sauvage, il le jeta sur le sol de manière à lui briser les os et à faire passer la couleur de ses joues.
Schenguil resta confondu de cette haute taille, de cette force et de ces épaules ; il invaqua en langue hindoue le nom de Dieu et jugea que Bahram valait plus que quarante hommes.
Lorsqu’ils furent ivres de vin doux à boire, ils quittè- rent la salle incrustée de pierreries et quand le ciel eut revêtu son manteau de satin noir, les jeunes et les vieux se reposèrent du festin et s’apprétèrent au sommeil, tous, le roi et les héros avides de combats.
Lorsque le manteau parfumé de musc commença à se dorer et que le soleil montra sa face sur la voûte du ciel, le roi des Indiens monta sur un destrier et se rendit au Meîdan, la raquette en main ; les gens du roi portèrent son arc et ses flèches et il jouta pendant quelque temps avec grand plaisir ; puis il ordonna à Bahram de monter à cheval et de prendre son arc royal.
Bahram lui répondit :
Ô roi !
Qà j’ai avec moi beaucoup de cavaliers de l’Iran qui tous ont envie de tirer des flèches et de jouer à la raquette ; quel ordre le noble roi leur donne-t-il ? »
Schenguil dit :
La flèche et l’arc sont certainement les vrais appuis du cavalier.
Toi, avec ta poitrine et avec les bras forts, lève ta main, bande ton arc et fais partir une flèche. »
Bahram Gour banda son arc, abandonna les rênes à son destrier ardent, plaça sur la corde une flèche, lâcha l’anneau et brisa le but avec une seule flèche.
Tous les cavaliers qui se trouvaient sur le Meïdan et tous les hommes de guerre répandirent des bénédictions sur lui.
Dernière mise à jour : 19 déc. 2021