Bahram dit :
Ô grands de l’Iran, qui connaissez le monde et les affaires !
Vous tous avez dit vrai et il y a pis à dire ; il est juste que je blâme mon père.
Il m’en esttresté une amertume dans le cœur ; c’est lui qui a terni mon esprit subtil, car sa cour - . était devenue une prison pour moi, lorsque Dieu m’a sècduru.
Thinousch m’a délivré de ses mains et j’ai pu m’échapper de son hameçon, le palais déchiré.
Depuis j’ai fait du désert de Mondhir mon refuge, car jamais le roi ne m’a montré de la bonté.
Puisse aucun homme n’avoir jamais cette nature !
S’il s’en trouvait un pareil, toute trace d’humanité disparaîtrait.
Grâces soient rendues à Dieu, qui m’a donné de l’intelligence et qui a nourri mon esprit avec de la raison !
Je demande à Dieu qu’il soit maintenant mon guide pour le bien, afin que je puisse effacer le péché de tout le mal que le roi a fait aux hommes.
Recherchons tous la tranquillité et la justice ; je serai le pâtre et vous serez le troupeau.
Je vivrai pour contenter mes sujets et comme le doit un adorateur de Dieu.
J’ai de la volonté, de l’instruction, de l’intelligence et de la valeur.
Un roi injuste n’en a jamais, car la bassesse et la perversité viennent de l’incapacité et il faut pleurer sur les hommes injustes.
Je suis l’héritier du trône de mes pères, j’ai de la raison et de la bienveillance.
Depuis Schapour fils de Bahram jusqu’à Ardeschir, tous les rois, vieux et jeunes, sont de père en fils mes ancêtres et mes guides dans la foi et la conduite, et, du côté de ma mère, je descends de la reine Schémiran, je suis de sa race et son égal en intelligence ; j’ai les mêmesfaw cultes, la même prudence, le même pouvoir ; je suis un cavalier, un brave et ma main est forte.
Je ne tiens personne pour mon égal, ni dans la bataille, ni dans la fête ni dans aucune affaire.
J’ai un trésor caché et plein ; j’ai des amis illustres et dévoués.
Je rendrai la terre florissante par la justice et vous tous en serez heureux.
Je vais faire une convention avec vous et que ma parole en soit le gage devant Dieu.
Nous dresserons le trône d’ivoire du roi des rois, nous y placerons cette riche couronne ; nous amènerons de la forêt deux lions sauvages et nous placerons la couronne entre eux ; nous attacherons les lions des deux côtés et celui qui a l’envie d’être roi ira prendre la couronne illustre sur le trône d’ivoire et la placera sur sa tête, il s’assiéra comme roi entre les deux lions, le roi au milieu, la couronne sur sa tête, le trône sous lui et nous ne nommerons roi que lui, pourvu qu’il soit un homme juste et pur.
Mais si vous refusez ce que propose, si vous choisissez un grand qui ne serait pas mon égal, alors, au lieu d’un chef comme moi, vous verrez, en guise d’épines et de mauvaises herbes dans vos champs, des lances de cavaliers ; moi et Mondhir, nos massues et nos épées tranchantes y serons et les héros arabes ne savent pas fuir.
Nous anéantirons votre roi des rois, nous lancerons vos têtes par-dessus la lune.
J’ai parlé, répondez.
Appliquez à cette cause l’intelligence qui porte bonheur,»
Il dit, se leva et rentra dans sa tente et tous les hommes étaient confondus de ses paroles.
Les nobles et les Mobeds de l’Iran et tous ceux qui avaient entendu le discours du prince plein de sagesse, dirent :
Voilà de la majesté donnée par Dieu ; il n’y a pas de perversité et de folie.
Il ne dit pas un mot qui ne soit juste et nous devrions nous en réjouir.
Quant aux lions féroces et au trône et à la couronne des Keïanides qu’on placerait entre eux, si les lions déchirent Bahram, le Distributeur de la justice ne nous demandera pas compte de son sang, car c’est lui qui l’a proposé et c’est son propre plan.
S’il meurt, nous pouvons être tranquilles ; et s’il s’empare de la couronne, il sera plus glorieux que Feridoun et nous ne reconnaitrons d’autre roi que lui.
Nous décidons selon ce qu’il a proposé lui-même."
Dernière mise à jour : 26 sept. 2021