Il emmena de Madaîn une armée qui couvrit le monde jusqu’à la mer ; la terre était obscurcie par la poussière, les yeux étaient fatigués de voir tant d’hommes.
Depuis une montagne jusqu’à l’autre il n’y avait que des hommes armés et au centre brillait. l’étendard du roi, qui conduisit à Gourgan cette armée qui rendait invisible le soleil.
La il se reposa
Pendant quelque temps à la chasse, traversant les montagnes et les prairies.
Pendant que le roi était à Gourgan, se consultant avec son armée, le Khakan se tenait à Soghd, où le pays entier élait comme submergé par les flots des descendants d’Ardjasp et d’Afrasiab.
Le Khakan disait souvent :
La terre fléchit sous mon armée et sous mon trône ; je vais vous conduire dans l’Iran et vers le désert des cavaliers arabes ; j’emporterai en Chine toute la terre de l’Iran, je convertirai à ma foi tous les Tazi.
Je ne permettrai à personne d’avoir un trône ou une couronne, un état royal, un pays et une haute fortunes Il se tint ainsi pendant quelque temps, parlant et rêvant la possession du monde à l’aide de son armée et de sa gloire ; mais à la fin il apprit que le roi se mettait en marche de l’Iran, avec tout l’appareil royal ; il entendit parler de sa fortune victorieuse, de sa puissance et de cette armée qui couvrait tout l’espace de mer en mer.
Le Khakan fut troublé de ces nouvelles, il perdit l’envie de faire cette guerre ; il s’assit plein de soucis avec ses conseillers ; les grands de l’armée s’assemblèrent et le Khakan dit à son Destour :
Il est impossible de cacher cette mauvaise nouvelle.
J’ai appris que Kesra est arrivé à Gourgan et qu’il a répandu ses troupes sur toute la surface du pays.
Évidemment il ne sait pas où nous sommes, puis c’est un homme dont la tête est dépourvue de sens.
Mon armée s’étend de la Chine jusqu’au Djihoun, le monde est sous la protection de mon diadème.
Il faut que j’aille au-devant de lui pour le combattre et tout délai ternirait l’éclat de mon nom et de ma gloire.
Il croit qu’on ne peut pas le dépasser ou qu’il n’y a dans le monde d’autre roi que lui ; mais il va apprendre qu’il y a des braves comme moi ; je m’avancerai contre lui avec les cavaliers chinois. »
Un homme intelligent dit au Khakan de la Chine :
Ô roi de la terre !
Ne parle pas d’une guerre contre le roi d’Iran ; ne livre pas au vent ton royaume et ton armée.
Aucun roi ne lui dispute son rang, à moins que son esprit et son intelligence ne soient obscurcis ; sur aucun trône n’est assis un roi aussi majestueux que lui et le lune dans le ciel n’est pas comparable à son aspect.
Il lève des tributs dans l’Inde, dans le Roum et partout où il y a des trésors et un pays cultivé ; il est le maître de la couronne et l’ornement du trône, il est le vigilant maître du monde et sa fortune est victorieuse. »
Le Khakan écouta ces paroles du Mobed et prit une résolution sensée.
Il dit à son dévoué ministre :
Quel est l’avis de ton esprit sage dans cette circonstance ?
Nous avons à choisir nécessairement entre deux manières d’agir, car ce serait de la folie de rester inactif.
Puisque la guerre contre Kesra ne nous rapporterait que de la peine. il n’y a3
rien de mieux à faire que de dépenser nos trésors.
L’or ne nous procure ni vêtements, ni nourriture, ni tapis. le jour où il faut se battre ; il faut qu’il donne d’abord de la sécurité ; puis viendront la nourriture, les beaux vêtements et les tapis.
Quand on craint un malheur, on prodigue l’argent et l’on a du repos. »
Dernière mise à jour : 7 sept. 2021