Khosrou ordonna qu’on dressât les tables, il fit appeler les grands pleins de’lîerté.
Lorsqu’ils se luun rent levés de la table du roi, on prépara une salle pour boire du vin.
On y voyait des esclaves dont la beauté éblouissait l’assemblée, des échansons, des joueurs de harpe parés de boucles d’oreilles et portant chacun sur la tête un lourd diadème d’or incrusté de pierreries ; leurs joues étaient colorées comme le brocart de Roum et les harpes résonnaient sous les doigts de ces fils de Péris.
On voyait des plateaux d’or pleins de musc pur, un bassin rempli d’eau de rose s’étendait devant l’assemblée et Khosrou brillait dans sa splendeur impériale comme une lune de deux semaines tau-dessus d’un cyprès élancé.
Tous les Pehlewans serviteurs du roi étaient ivres lorsqu’ils sortirent du palais.
Rustem se rendit au palais à l’aube du jour, le cœur joyeux, la ceinture serrée étroitement, pour demander la permission de s’en retourner chez lui.
Il débattit ce point sagement avec le roi.
Ensuite Khosrou fit apporter un habillement complet, comprenant une tunique et un diadème brodés de pierreries et une coupe remplie de joyaux dignes d’un roi ; il fit amener cent chevaux sellés et cent mulets chargés, cent femmes esclaves au visage de Péri et cent serviteurs portant des couronnes d’or.
Toutes ces richesses étant réunies et placées devant le roi maître du monde, il les donna toutes à Rustem au cœur de lion, qui baisa la terre et se relevant, posa sur sa tête ce diadème de Keïauide et se ceignit de a cette ceinture impériale.
Ensuite, il sortit en bénissant le roi et fit en toute hâte les préparatifs de son départ pour le Seistan.
Il distribua aux grands qui avaient partagé ses combats et ses fatigues, ses joies et ses soucis, des présents à chacun selon son rang et ils sortirent gaiement du palais de Khosrou.
Le roi, quand les héros l’eurent quitté, s’assit sur son trône pour se reposer.
Il fit venir Bijen et lui parla des peines et des anxiétés qu’il avait éprouvées ; et Bijen lui raconta longuement ses chaînes, sa prison, son dernier combat et lui exposa toute l’histoire de ses malheurs.
Khosrou en fut ému et plaignit beaucoup la malheureuse fille d’Afrasiab à cause des fatigues et des soucis qu’elle avait endurés.
Il fit apporter cent robes de brocart de Roum toutes brodées de pierreries et d’or fin, une couronne et dix caisses remplies d’or, des esclaves et des chevaux et beaucoup d’autres richesses et il dit à Bijen :
Porte ce présent à cette femme qui a tant souffert ; ne lui fais jamais de peine, ne lui adresse pas une parole froide, pense aux maux que tu lui as causés.
Passe avec elle ta vie dans le bonheur et réfléchis sur la manière dont tourne le sort : il élève l’un jusqu’au sublime firmament et l’exempte de tout souci et de toute peine ; ensuite le ciel le précipite dans la tombe.
Le ciel qui tourne est un lieu plein de terreurs et de craintes ; car il jette brusquement V le même homme qu’il a élevé tendrement sur son sein, dans une fosse où il manquera de tout.
Il prend un autre homme dans un cachot et le porte surie trône, en lui mettant sur la tête un diadème de pierreries.
Le destin ne rougit pas de mal faire et il n’a de tendresse pour personne ; il est éternellement le maître du bonheur et du malheur, mais il ne demande à personne de l’amitié.
Telle est la coutume de ce monde passager, qui nous guide sur la route du bien et du mal ; mais aussi longtemps que tu le garantiras du souci des richesses, ton cœur noble demeurera exempt de trouble. »
J’ai maintenant raconté en entier cette aventure, telle que je l’ai entendu réciter selon la tradition antique ; et ayant achevé l’histoire de Bijen, je vais parler de Gouderz et de Piran.
Dernière mise à jour : 31 déc. 2021