Keï Kaous

4ème aventure - Rustem tue une magicienne

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Ayant achevé ses dévotions, Rustem mit à Raksch ses caparaçons, monta à cheval, reprit son chemin et entra dans le pays des magiciens.

Il fit avec rapidité une longue marche et au moment où la lumière du soleil disparaissait, il vit des arbres, de l’herbe et de l’eau vive, enfin un lieu digne d’un jeune héros ; il vit une source semblable à l’œil du faisan et dans une coupe du vin rouge comme le sang du pigeon, un argali rôti, du pain placé dessus, une salière et des confitures disposées autour.

Il descendit de cheval, ôta la selle à Raksch et s’approcha, tout étonné, de l’argali et du pain : c’était le repas des magiciens, qui avaient disparu à l’arrivée de Rustem et au son de sa voix.

Il s’assit à côté de la fontaine, sur un tas de roseaux et remplit de vin une coupe de rubis.

Il trouva à côté du vin une lyre aux sons harmonieux et le désert entier était comme une salle de banquet.

Rustem appuyant la lyre contre sa poitrine, en tira des sons mélodieux et chanta ce qui suit :

Rustem est le fléau des méchants, aussi les jours de joie sont-ils rares pour lui.

Chaque champ de bataille est son champ de tournois ; le désert et la montagne sont ses jardins ; tous ses combats sont contre des Divs et des dragons courageux et il ne pourra jamais se débarrasser des Divs et des déserts.

Le vin et la coupe, la rose parfumée et le jardin ne sont pas la part que la fortune m’a faite ; je suis toujours occupé à combattre les crocodiles ou à me défendre contre les tigres.

Ce chant, accompagné des soupirs de Rustem et du son que rendait l’instrument sous ses doigts, frappa l’oreille d’une magicienne.

Elle arrangea son visage comme le printemps, quoique tous ces charmes ne lui convinssent pas ; puis elle s’approcha de Rustem, toute belle de couleurs et de parfums, lui demanda de ses nouvelles et s’assit à côté de lui.

Tehemten adressa une prière à Dieu, invoqua sa protection et lui rendit des actions de grâces de ce qu’il trouvait ainsi, dans le désert du Mazenderan, du vin, de la musique et une jeune fille pour boire avec lui.

Il ne savait pas que c’était une vile magicienne, un Ahriman caché sous de belles couleurs.

Il lui mit en main une coupe de vin et prononça le nom de Dieu le juste, le dispensateur de tout bien ; et aussitôt qu’il eut prononcé le nom du maître de l’amour, les traits de la magicienne changèrent, car son esprit ne connaissait pas le sens de l’adoration et sa langue ne savait pas dire une prière.

Elle devint noire lorsqu’elle entendit le nom de Dieu ; et Rustem, aussitôt qu’il l’eut regardée, lança, plus rapide que le vent, le nœud de son lacet et enchaîna soudain la tête de la magicienne.

Il lui adressa des questions et lui dit :

Avoue qui tu es, montre-toi sous ta véritable forme.

Alors elle se changea dans son lacet en vieille femme décrépite, pleine de rides et de sortilèges, de magie et de méchanceté.

Il la coupa en deux et remplit de terreur le cœur des magiciens.

Dernière mise à jour : 7 sept. 2021