Lorsque Afrasiab apprit que Siawusch arrivait en grande pompe, il courut à pied de la salle d’au-dience jusque dans la rue, ceint au milieu du corps et la tête remplie d’impatience.
Siawusch le voyant à pied, descendit de cheval et courut au-devant de lui.
Ils se pressèrent dans les bras l’un de l’autre et se baisèrent plusieurs fois les yeux et la tête.
Afrasiab dit :
Le mal qui affligeait le monde s’est donc assoupi ; la guerre ne fera plus naître la désolation et la brebis et le léopard iront s’abreuver ensemble.
Le monde a été jeté dans les troubles par Tour le courageux ; mais la terre est fatiguée de la guerre.
Les deux pays étaient tous les ans remplis de discorde et les pensées des hommes étaient éloignées de la paix.
Maintenant, grâce à toi, la terre se réjouira, se reposera de la guerre et ne sera plus inondée de sang.
Toutes les villes du Touran te sont soumises ; tous les cœurs sont remplis d’amour pour toi ; tout ce que j’ai, mon cœur.et mon âme t’ap-
’1 partiennent et le Sipehbed Piran est à toi de cœur et de corps.
Il t’aimera comme un père, il ramènera le sourire sur tes lèvres. »
Siawusch influa les bénédictions de Dieu sur Afrasiab, en disant :
Puisse le bonheur ne te quitter jamais dans ce monde !
Grâce soit rendue à Dieu le créateur, lui dont vient le repos et la guerre et la haine ! »
Le roi, tenant dans sa main la main de Siawusch, monta sur son trône royal et s’assit.
Il regarda le visage de Siawusch et dit :
Je ne lui connais point d’égal sur la terre et il n’y a pas d’homme qui ait ces traits, cette stature et cet air de grandeur. »
Ensuite, il se tourna vers Piran, disant :
Kaous est un vieillard de peu de sens.
Qui peut donc laisser partir avec indifférence un fils comme Siawusch, si haut de stature et si brave ?
Le l’ai vu en songe et mon cœur en a été confondu.
Quand un homme a un pareil fils, comment peut-il laisser errer ses yeux dans le monde pour chercher autre chose que lui ? »
N Ensuite, il choisit un de ses palais et le tendit entièrement de tissus d’or ; on y plaça un trône d’or dont les pieds avaient la forme de têtes de buffles ; on le couvrit de brocarts d’or ; on demanda du»
La magasins du roi des meubles de toute espèce.
Le roi dit alors à Siawusch qu’il pouvait disposer à son gré de ce trône et de cette demeure et s’y établir à son aise.
Lorsque Siawusch entra dans la salle d’au-dience, la voûte s’élever jusqu’à Saturne, fière d’un tel hôte.
Il monta et s’assit sur le trône d’or et son esprit prudent se livra à ses pensées.
On prépara la table du roi et l’on vint y appeler Siawusch.
Pendant le dîner on parla de toute chose et tous les convives se livrèrent à la gaieté.
Lorsqu’ils se levèrent de la table du roi, ils trouvèrent qu’on avait apprêté une salle de banquet ; tous les grands s’y rendirent, précédés de chanteurs et de musiciens et s’assirent pour boire du vin.
Ils en burent jusqu’à ce que les ténèbres couvrissent la terre et que la tête des convives fût troublée par le vin.
Siawusch retourna gaiement à son palais, et, dans son ivresse, il ne pensa plus à l’Iran.
Afrasiab lui donna son cœur et son âme et l’image de Siawusch l’empêcha de dormir.
Dans cette même nuit il donna ses ordres aux grands qui se trouvaient dans la salle du banquet, en disant à Schideh son fils :
Aussitôt que le soleil montrera sa tête au-dessus des montagnes, toi et les Pehlewans, mes parents et les plus grands personnages de ma cour, vous vous rendrez tous ensemble, à l’aube du jour, avec des présents et des esclaves, avec des chevaux de noble race, caparaçonnés d’or, au palais de Siawusch et vous vous y présenterez prudemment, discrè-tement et en silence. »
Tous les grands de l’armée se rendirent dans l’ordre prescrit auprès de Siawusch, avec des présents, avec de l’or et des joyaux dignes
D’un roi.
Ils les placèrent devant lui et lui adressèrent des paroles amicales.
Le roi lui envoya, de son côté, beaucoup de présents ; et ainsi se passa une semaine.
Dernière mise à jour : 7 sept. 2021