Lorsque Parmoudeh apprit que Bahram cherchait à s’emparer du trône impérial, il plaça tout ce qu’il avait d’argent, d’or, de joyaux et d’autres richesses dans un château qu’il possédait et qu’on appelait Avvazeh, lieu où il était en sécurité et où il pouvait jouir de la vie.
Il passa lui-même le Djihoun avec son armée et il s’avança en grande pompe vers le champ de bataille.
Les deux armées s’approchèrent l’une de l’autre pour se combattre, elles ne s’arrêtèrent nulle part sur la route ; elles choisirent, à deux journées de Balkh, un lieu convenable pour leurs camps, laissant entre elles un espace de deux linsangs, occupé par une large plaine, propre à ser-
Vir de champ de bataille.
Le lendemain le vaillant Bahram sortit en toute hâte pour jeter un coup d’œil sur les troupes de Parmoudeh.
Celui-ci regarda et l’aperçut ; il choisit dans la plaine une colline escarpée et disposa devant cette hauteur toute son armée, qui était telle qu’il ne restait pas de place vide sur cette plaine.
Puis Parmo’udeh vit des troupes telles que le désert tremblait à leur aspect, il vit au-devant de son armée Bahram, élevant jusqu’au ciel sa tête guerrière et resta confondu de cette stature et de ces membres et invoqua à plusieurs reprises le nom de Dieu ; il devint inquiet et dit à son escorte :
Ce chef est le compagnon d’Ahriman ; on ne peut pas juger du nombre de ses troupes et personne ne voudra les attaquer, car leur Sipehdar est un homme fier et colère et la poussière noire sous ses pieds deviendra une mare de sang.
Mais quand les ténèbres seront arrivées, nous ferons une attaque de nuit, rejetant de nos cœurs toute crainte et tout souci. »
Quand il fut rentré dans l’enceinte de ses tentes, il tint un conseil de guerre et dit :
Ceci est une des plus grandes entreprises, car quoique cette armée soit peu nombreuse, ce sont des cavaliers et des chevaux magnifiques et ils occupent le premier rang parmi les guerriers les plus tiers. lis sont bien armés et ont pour chef Bahram, pour lequel les pointes des lances ne sont que comme des épines et de mauvaises herbes et qui est plein d’orgueil d’avoir vaincu le roi Saweh et ivre de sang.
Mais si le Créa-leur me vient en aide, je vengerai la mort de mon père, mon ennemi fûti1 une montagne. »
’ Du temps que Bahram était entré en campagne et avait quitté l’Iran, marchant contre les Turcs, un astrologue lui avait dit :
N’entreprends rien le mercredi.
Si tu ne fais pas attention à ce conseil, il rr t’en arrivera malheur et tes affaires ne tourneront pas à ton avantagea Or, entre les deux armées se trouvait un jardin, au milieu du champ de bataille et Bahram se rendit le mercredi matin dans ce jar--din, disant :
Nous allons nous amuser aujourd’hui !
N On y porta de riches tapis, du vin et des vivres, on y envoya des musiciens et Bahram arriva au jardin ét se mit à boire.
Mais lorsque la première veille de la nuit sombre fut passée, une ronde rentra chez Parmoudeh et raconta que Bahram s’occupait de vins et de coupes.
Le chef de l’armée choisit parmi ses troupes six mille vaillants cavaliers et envoya ces hommes, qui portaient haut la tête, entourer le jardin, sans montrer de lumière.
Le Sipehhed fut informé de leur mouvement, des intentions et du plan de leur prince et dit à Yelan Sineh :
Ô homme illustre !
Fais une brèche dans le mur du jardina»
Puis lui et Ized Guschasp montèrent à cheval avec les plus ardents de leurs compagnons et sortirent du jardin par cette brèche ; Dieu ù’t
Sait comment ces fiers cavaliers y réussirent.
On entendit de la porte du jardin le son des trompettes. le Sipehhed se précipita dans la mêlée, ont lit rapidement une seconde brèche et la Per. »
Renversèrent tout le corps lm ; Bahram, un javelot en main, bondissait comme fait un homme à moitié ivre.
Peu de Turcs échappèrent à sa main, sa tête était insatiable de sang.
On entendit le fracas des coups que donnaient les chefs, comme des coups de marteau d’a-cier sur l’enclume des forgerons et depuis ce jardin jusqu’au camp du roitParmoudeh, toute la route fut couverte de corps privés de leurs têtes.
Lorsque le hautain Bahram fut de retour à son camp ., il médita à son tour une attaque de nuit et quand la moitié de la nuit sombre fut écoulée, le vaillant Sipehhed revêtit son armure et conduisit ses troupes de l’autre côté de la plaine, sans qu’une ronde turque l’eût aperçu.
Arrivé près du camp un, il fit monter le son des clairons jusqu’à la lune.
Lorsque retentit au milieu de la nuit ce son des trompettes, les cavaliers turcs se levèrent soudain, ils se levèrent de tous côtés dans les ténèbres à l’aile droite et à l’aile gauche de l’armée, mais ils ne se reconnaissaient pas l’un l’autre au milieu de l’obscurité et de ces longues lances.
On fit sortir des épées des lammes qui brûlaient l’air et la terre ; il ne resta pas beaucoup de vaillants Turcs et le sang rendit les pierres semblables au corail. 5H Le roi s’enfuit rapidement commeila poussière, la bouche sèche, les lèvres bleues ; il courut ainsi jus--qu’à ce que l’aurore se fût montrée dans sonéclat et que la nuit sombre eût retiré le pan de sa robe ; alors le Sipehdar iranien atteignit les Turcs et fit entendre un cri comme celui d’un lion terrible.
Il dit à Parmoudeh :
c0 toi, qui t’enfuis, ne te mêle donc ce pas aux hommes de guerre !
Tu n’es pas encore un homme, d mon fils, tu .es un enfant et tu ferais bien de sucer le lait de ta mère. »
Le roi répondit :
’0 lion destructeur !
Jusques à quand répandrastu du sang î En ce jour de combat, les crocodiles dans la rivière et les léopards sur la terre sont rassasiés du sang des nobles, toi seul n’es-tu pas les de le verser ?
Je crois que tu es un lion féroce.
Tu as tranché la tête à Saweh ,ique le ciel qui tourne avait traité avec tendresse pendant toute sa vie ; tu as détruit son armée de telle façon que le soleil et la lune en ont eu pitié.
Je suis l’héritier de ce rail»
Lent roi ; sache que moi aussi tu m’as battu misée rablement ; mais nos mères nous mettent tous au monde pour la mort, que nous soyons Turcs ou Perses.
Je suis en fuite et tu cours après moi, mais tu ne me saisiras que quand le moment de me mort sera arrivé et si je reviens les armes à la main, c’est peut-être moi qui périrai, peut-être toi.
N’irrite pas ton cerveau, n’enflamme pas ta tète. ce n’est pas ainsi que se conduit le chef d’une lift.
5l ?
Armée.
Je me rends à me tente, je tâcherai de revenir sur mes pas ; j’écrirai au roi une lettre telle qu’il convient aux circonstances actuelles, espérant ce qu’il l’accueillera favorablement et qu’il me délivrera de cette invasion.
Je suis l’esclave de son trône, je renonce à toute idée de souveraineté.
Écarte donc de ton cœur toute pensée de guerre et de lutte, sois de bonne humeur et livre-toi aux fêtes. »
Bahram l’écoute et s’en retourna, puisqu’il était d’accord avec lui sur la souveraineté.
S’étant reposé du combat qu’il avait livré à cette armée, il se rendit au camp du roi Parmoudeh ; il fit le tour du champ de bataille et coupa la tête aux chefs morts ; on réunit ces têtes et elles formèrent une grande masse ; Bahram fit amonceler dessus toute une montagne de pierres et les guerriers illustres donnèrent àlce lieu le nom de Bahram Tel.
Il fit porter vers cette colline les armures des cavaliers et tout le butin qu’il voyait ; puis il écrivit une lettre au roi sur Parmoudeh et son armée innombrable ; il raconta ce qui lui était arrivé avec les Turcs et leur roi avide de combats, qui, de peur de l’épée, avait eu recours à la ruse et, était parti de ce lieu abattu et avili.
Le Khakan, de son côté, ferma la porte du château d’Awazeh et s’assit, livré à une foule de soucis.
Beau- coup d’hommes s’assemhlèrent autour de son château, mais personne ne connaissait ses plans pour la guerre.
Dernière mise à jour : 7 sept. 2021