Lorsque la moitié du jour lumineux fut passée, le cœur des deux braves brûlait du désir de la vengeance ; ils délibérèrent ensemble et se jetèrent dans toute espèce de plans insensés.
Ils se proposèrent de surprendre Minoutchehr quand la nuit serait venue et de remplir de sang la plaine et le désert.
Lorsque la nuit fut venue et que le jour eut disparu, lorsque les ténèbres eurent enveloppé le monde entier, les deux impies firent prendre les armes à leurs troupes et se préparèrent avec ardeur pour une attaque nocturne.
Mais aussitôt que les espions en eurent nouvelle, ils accoururent vers Minoutchehr et lui racontèrent ce qu’ils avaient entendu, pour qu’il disposât son armée.
Le prince les écouta et leur prêta attention, puis il s’occupe avec prudence des moyens de défense.
Il donna le commandement de toute l’armée à Karen et choisit pour lui-même une place pour une embuscade.
Parmi les chefs pleins de renom, il en prit trente mille braves, vaillants et armés de poignards.
Il trouva une place convenable pour une embuscade et vit que les cavaliers étaient pleins d’ardeurs et tels qu’il en avait besoin.
Tour, quand la nuit fut devenue sombre, s’avança avec cent mille hommes ceints pour le combat, résolus et préparés à tenter l’attaque nocturne et levant leurs lances jusqu’aux nuages ; mais lorsqu’il arriva, il vit l’armée en ordre et des étendards brillants devant elle.
Il vit qu’il ne lui restait qu’à combattre et à lutter et éleva le cri de guerre au milieu de ses troupes.
L’air devint comme un nuage par la poussière des cavaliers et les épées d’acier parurent comme des éclairs brillants ; on aurait dit que l’air était tout embrasé et que, resplendissant comme le diamant, il brûlait la surface de la terre.
Le bruit de l’acier pénétrait les cerveaux, le feu et le vent se levaient vers le ciel.
Le roi sortit de son embuscade et Tour ne vit plus de retraite d’aucun côté ; il ramassa les rênes de son cheval et tourna le dos et des cris effrayants s’élevaient de l’armée.
Minoutchehr se précipita après lui et plein du désir de la vengeance, il atteignit Tour le renommé.
Il poussa un grand cri contre cet homme injuste :
Arrête, ô tyran plein d’ardeur pour le combat !
Est-ce ainsi que tu arrachais la tête des innocents, sans penser que le monde crierait vengeance contre toi !
Il enfonça sa lance dans le dos de Tour, qui laissa échapper de ses mains son épée : rapide comme le vent, il l’enleva de la selle, le jeta par terre et fit tout ce que la bravoure exige.
Il sépara sur-le-champ la tête du tronc et fit de son corps une fête pour les bêtes fauves, puis il retourna à son camp, en contemplant cette tête, signe d'une fortune si haute et si basse.
Dernière mise à jour : 7 sept. 2021